Contre la pauvreté des jeunes

Pour un véritable droit à l’accompagnement

Par Mathieu Klein — maire de Nancy, président de la Métropole du Grand Nancy (Tribune adaptée, 2021)

La crise du Covid-19 a mis à nu les fragilités de notre modèle social. Ironie du sort : ceux qui dénonçaient hier le « pognon de dingue » dépensé pour les aides publiques se sont convertis au « quoi qu’il en coûte ». Mais derrière cette solidarité nationale, une génération entière se sent oubliée : les jeunes.

Une jeunesse frappée de plein fouet

Le chômage des moins de 25 ans a bondi de 16 % depuis le début de la pandémie. Étudiants précarisés, jeunes diplômés sans emploi, apprentis interrompus : jamais leur situation n’a semblé aussi alarmante. Les appels à l’aide se multiplient, exprimant la peur d’une génération qui se sent “sacrifiée”.

Pourtant, les politiques publiques stagnent. Le plan jeunes du gouvernement a certes permis un soutien d’urgence, notamment via la garantie jeunes, mais l’essentiel manque toujours : un véritable accès à un minimum de ressources et à des droits durables.

Le « bizutage social » des moins de 25 ans

Mathieu Klein dénonce une injustice flagrante : alors qu’un retraité peut bénéficier d’un minimum de 903 euros par mois et un adulte de 564 euros, les jeunes de 18 à 25 ans n’ont droit à rien. Ce vide institutionnel transforme leur entrée dans la vie active en “bizutage social”.

“Je ne crois pas aux solutions qui veulent transformer les jeunes en entrepreneurs d’eux-mêmes”, écrit-il. L’autonomie ne peut pas reposer sur l’endettement ou la débrouille : elle doit s’appuyer sur des droits, des moyens et un accompagnement digne de ce nom.

Le RSA, un droit à étendre

Le maire de Nancy plaide pour l’ouverture du RSA aux moins de 25 ans. Les jeunes ne demandent pas la charité, mais un cadre juste qui leur permette de s’insérer sans tomber dans la précarité.
Mais il le rappelle : le RSA n’est pas une fin en soi. L’enjeu n’est pas de garantir un revenu minimum d’inactivité, mais d’accompagner les jeunes vers la formation, l’emploi et l’autonomie.

Une nouvelle génération d’emplois d’utilité sociale

Pour cela, Mathieu Klein propose la création d’un droit universel à l’accompagnement vers le premier emploi.
Ce dispositif offrirait à chaque jeune un soutien personnalisé, financier et professionnel, jusqu’à sa première insertion réussie.
Il suggère également une nouvelle génération d’emplois-jeunes, tournée vers les missions d’utilité sociale, car cet outil a déjà prouvé son efficacité dans le passé.

Repenser la solidarité intergénérationnelle

Le maire appelle à une réforme ambitieuse de la solidarité nationale : permettre aux jeunes d’ouvrir des droits anticipés à l’assurance-chômage, financés par un mécanisme de solidarité entre générations.
Ce système pourrait prendre la forme d’une allocation pour la recherche du premier emploi ou d’un capital de départ pour la création d’activité.

Redonner confiance dans l’action publique

“Contre la pauvreté des jeunes, c’est l’ensemble de notre démocratie sociale qu’il faut mobiliser”, conclut Mathieu Klein.
Au-delà des aides d’urgence, il appelle à une véritable ambition collective : garantir à chaque jeune un accompagnement digne, une formation solide et une place reconnue dans la société.